THE TIME YOU ENJOY WASTING IS NOT WASTED TIME
"Bertrand Russel"

mercredi 9 décembre 2009

De gommes à effacer et autres drames...

Déjà 29 ans! C'est pas possible... Je me souviens être à ma table à dessin en train de finaliser un portrait pendant que Tootsie s'amusait à jouer au hockey avec mes effaces Steadler. Tootsie c'est la chatte avec laquelle j'ai partagé 14 ans de ma vie. J'vous dis qu'elle en a vu, des choses! C'est bête à dire, mais ce fut l'être le plus près de moi. Le témoin direct de tous mes émois, de mes bons coups comme de mes désespoirs. Personne d'autre n'a jamais vraiment su. C'est que j'étais championne de l'introversion, à cette époque! M'enfin...

Donc, pendant que Tootsie s'affairait à me subtiliser une énième gomme à effacer, c'est là que l'animateur à la radio balbutia des paroles impossibles. Des propos inimaginables, des mots qui me glacèrent le sang. Je suis restée hébétée pendant un temps indéterminé, à fixer le vide alors qu'un bourdonnement sourd me remplissait la tête. Combien de temps suis-je resté comme ça, je ne sais même pas. Quelques minutes, une heure, des heures? Et l'animateur qui ne cessait d'ajouter de nouveaux détails au fur et à mesure qu'il les obtenait. Je ne saurais dire combien de temps a pris cette information pour se rendre de mon cerveau à mon coeur, car il y avait beaucoup de résistance sur ce chemin. Ma tête criait NON! Mais mon coeur a fini par encaisser le coup. Puis des larmes de rage, de douleur et d'incompréhension se sont versées sur ma table à dessin, sur le pelage de Tootsie que je tenais bien serrée sur mon coeur et qui attendait patiemment que la crise passe. Un fou venait de tirer sur John Lennon, comme ça, à bout portant, en pleine rue. Le genre de nouvelle qui vous déchire un coeur de groupie en moins de deux. Un premier Beatles venait de partir. Pour toujours. À jamais.



Ce fut aussi mon premier contact avec la cruauté humaine, la folie. Bien sur, ce n'était pas la première fois qu'un tel drame se produisait dans l'histoire, mais l'insouciance et l'univers douillet de ma jeunesse m'avaient préservé des atteintes de ce genre d'actes horribles. Tant que ça se produit ailleurs, très loin et sur des gens que l'on ne connais pas, on ne lève même pas le sourcil quand l'animateur de radio débite sa mauvaise nouvelle. Tout au plus, on se dit que c'est dont plate puis c'est tout. Depuis, il y a en eu tout plein d'autres, de ces drames, juste à penser à Polytechnique, les tours du WTC, la tuerie du collège Dawson. Tous des actes tout aussi incompréhensibles perpétrés par un (ou des) pauvre type dont la perception de la vie est biaisée par on ne sait trop quoi, et qui m'ont bouleversés tout autant, mais sans la douleur. Juste cette foutue incompréhension, et une impuissance infinie. D'ailleurs y a-t'il de quoi à comprendre? J'ai bien peur que non. Et de ces pauvres types, on a pas fini d'en entendre parler, malheureusement. Je crains que la société ne soit de plus en plus malade. Et le temps passe et estompe tout, mais de John Lennon, on se souvient encore, et on s'en souviendra longtemps. Mais du pauvre type qui l'a abattu, je n'en écrirai même pas le nom.

Lorsque j'ai quitté cet appartement, l'été suivant, j'ai retrouvé tout plein d'effaces Steadler lors du déménagement, aux endroits où étaient le frigo et les laveuses-sécheuses.

Aujourd'hui, à chaque fois que j'utilise une de ces gommes à effacer, j'ai une pensée pour Tootsie. Et si je suis dans un certain mood, j'en ai aussi une pour John Lennon, causée par une de ces entourloupettes de mon cerveau. Sauf que rien n'effacera certains souvenirs...

Et vous, que faisiez-vous le 9 octobre 1980? (Si vous étiez nés, bien sûr!)

4 commentaires:

  1. John Lennon, putain de merde, je me suis posé la question hier et n'ai malheureusement pas la réponse... je ne me rappelle plus ce que je faisais à l'instant où j'ai appris sa mort. Merde c'est bête quand même.

    Pour Elvis et Gilles Villeneuve, ça va, mais Lennon, niet. Aurais-je inconsciemment steadleré ce moment de ma mémoire ?

    C'est sûr que lui et Tootsie nous manque.

    Et, ah oui, il est très beau ton texte.

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  2. lorsque tu as parle de l'animateur, je t'ai vu venir avec ton lennon. honnetement, je ne me rappelle pas non plus ou j'etais, mais je me rappelle que la nouvelle m'avait choque.

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  3. @ MightyMite: Je me souviens aussi des moments des disparitions du King et de Villeneuve, mais avec beaucoup moins d'acuité. Probablement que ces évènements me touchaient moins.

    Faut croire qu'Elvis et Gilles t'ont plus impressionné que John! Ha,Ha! Non... comme tu dis, ton subconscient a probablement oblitérer ce drame horrible de par sa gratuité.

    Et merci pour le compliment! ;¬)

    @ Ticklebear: Choquant, en effet!!
    J'ai des si gros sabots que ça?
    ;¬)

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