THE TIME YOU ENJOY WASTING IS NOT WASTED TIME
"Bertrand Russel"

mercredi 16 avril 2008

La pêche à la mouche

Il s'avance dans la fraîcheur du petit matin, posant les pieds sur l'herbe ruissellante d'humidité. La lueur des dernières étoiles le guide jusqu'à la rive, où l'attend, bercée par un léger clapotis sa bonne vieille chaloupe endormie parmi les joncs. Il y dépose son gréement, enjambe la rambarde en prenant soin de ne pas renverser son thermos de café, et d'un ou deux coups de rame se laisse glisser doucement en dehors de cette mini jungle aquatique. Par mouvements expérimentés, il glisse silencieusement sur cette surface lisse et opaque. Par-delà la cîme des arbres, sombres silhouettes sentinelles, le ciel s'éclaircit lentement jusqu'à s'empourprer à la venue du soleil. Un huart fait entendre sa plainte, réverbérée sur toute la surface de l'eau jusque dans les bois environnants. Puis, suite à un signal mystérieux, un concert de pépiements de toutes sortes explose de partout à la fois, célébrant ce jour naissant.
Le rameur est empli d'une joie pastorale. Il est envahi par un sentiment d'osmose avec le cosmos. La certitude d'être exactement au bon endroit au bon moment. Comme si les dieux lui permettaient d'assister à la genèse de la vie. Il se sent privilégié et heureux.
Ainsi passèrent les heures, seul avec l'infini, à méditer tout en lançant sa ligne au travers ce miroir où seul le ciel se mire.

Une fois le moment magique passé, quand les elfes et les fées disparaissent à la lumière crue du jour, le pêcheur sort de sa méditation et revient vers la rive. Il range ses appâts, vide son embarcation et remonte d'un pas lent vers son établi, la tête encore engourdie de félicité. Il dépose ses prises sur le bois usé et d'une lame bien affûtée s'apprête à les préparer. Et c'est là que toute la patience du pêcheur et l'amour du travail fait selon des rites précis sont mis à contribution... car il a beau être zen, mais là... vider des mouches et les tailler en beaux filets, faut le faire!


illustration : La famille de huarts (huile sur toile) Gisèle Benoît

2 commentaires:

  1. D'une poésie à faire pleurer...MAIS... la fin me laisse, pour le moins, pantois.

    Des filets de mouches ???

    Je ne sais pas de quoi est constituée ta ration quotidienne de médicaments mais bon sang, de grâce, revise ta posologie.

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  2. Ben quoi... j'avoue y connaître que dalle en matière de pêche, mais si il avait décidé d'aller pêcher autre chose, aussi...

    Bon... humm... s'cusez... une fille s'essaye

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